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Le Pape François a signé la préface de «Femmes et ministères dans l’Église synodale», écrit par les cardinaux Hollerich et O’Malley et trois théologiennes, dont l’évêque anglican Jo Bailey Wells, qui ont participé à la réunion du C9 en février dernier. Pour le Saint-Père, «le drame des abus nous a obligés à ouvrir les yeux sur le fléau du cléricalisme qui est une manière déformée d’exercer le pouvoir dans l’Église dans laquelle tout le monde peut tomber: même les laïcs et les femmes».

Les femmes, leur rôle et leur souffrance pour la reconnaissance «de ce qu’elles sont et de ce qu’elles font». Puis les ministères ordonnés, la synodalité, le drame des abus qui «nous a ouvert les yeux» sur le «fléau» du cléricalisme et l’exercice déformé du pouvoir dans l’Église, même par les laïcs, même par les femmes elles-mêmes.

Toutes ces questions ecclésiales sensibles sont abordées dans la préface que le Pape François a signée pour le livre, « Femmes et ministères dans l’Église synodale« , un ouvrage à dix mains écrit par trois théologiennes et deux cardinaux: la sœur salésienne Linda Pocher, professeur de christologie et de mariologie à l’Auxilium de Rome (qui a également signé l’introduction); Jo Bailey Wells, évêque de l’Église d’Angleterre et sous-secrétaire générale de la Communion anglicane; ainsi que Giuliva Di Berardino, consacrée de l’Ordre des Vierges du diocèse de Vérone, liturgiste, professeur et responsable de cours de spiritualité et d’exercices spirituels. Les cardinaux Jean-Claude Hollerich, archevêque de Luxembourg et rapporteur général du Synode, et Seán Patrick O’Malley, président de la Commission pontificale pour la protection des mineurs, ont également participé à l’écriture de ce livre.

Dialogue entre auteurs

Ce dialogue, en l’occurrence virtuel, ou plutôt «littéraire», est toutefois le fruit d’un véritable dialogue entre les auteurs eux-mêmes, ainsi qu’avec le Pape et le Conseil des cardinaux lors de la réunion du C9 du 5 février 2024. Une réunion à laquelle, pour la première fois depuis l’institution de cet organe, les trois théologiennes ont été invitées par le Souverain pontife à participer, afin d’offrir des contributions et des «provocations», selon la définition de François, sur le thème du «rôle de la femme dans l’Église».

La question est maintenant explorée dans cette nouvelle publication parue le 9 juillet. Elle fait suite au précédent livre de Sœur Linda Pocher et d’autres auteurs dont le titre « Démasculiniser l’Église« , s’inspire d’une expression du Pape lui-même.

Les ministères ecclésiaux, un sujet important et sensible

Dans la préface, publiée ce jeudi dans son intégralité par L’Osservatore Romano, le Pape déroule sa réflexion à partir de l’un des postulats clés de son pontificat: «la réalité est plus importante que l’idée». C’est le même principe -et François s’en dit satisfait- qui guide «le programme proposé par sœur Pocher pour la formation du Conseil des cardinaux sur le thème de la femme dans l’Église, même en ce qui concerne une question aussi importante que délicate comme celle des ministères dans la communauté ecclésiale».

Le drame des abus

Derrière ce thème se cache «une certaine souffrance des communautés ecclésiales quant à la manière de comprendre et de vivre le ministère». Ce n’est pas «une réalité nouvelle», a souligné le Saint-Père, rappelant comment «le drame des abus nous a obligés à ouvrir les yeux sur le fléau du cléricalisme, qui ne concerne pas seulement les ministres ordonnés, mais une manière déformée d’exercer le pouvoir dans l’Église dans laquelle tout le monde peut tomber: même les laïcs, même les femmes».

«Écouter les souffrances et les joies des femmes est certainement une façon de nous ouvrir à la réalité», a estimé François.

“En les écoutant sans jugement et sans préjugés, nous nous rendons compte qu’en de nombreux endroits et dans de nombreuses situations, les femmes dans l’Église souffrent précisément du manque de reconnaissance de ce qu’elles sont et de ce qu’elles font, mais aussi de ce qu’elles pourraient faire et être si seulement elles en avaient l’espace et l’opportunité. Les femmes qui souffrent le plus sont souvent celles qui sont les plus proches, les plus disponibles, préparées et prêtes à servir Dieu et son Royaume.”

Ne pas sacrifier la réalité sur l’autel des idées

Le Pape François nous invite donc à regarder la réalité plutôt que les idées, afin d’éviter de tomber dans le «piège» dans lequel l’Église elle-même a souvent trébuché au cours de l’ère moderne, à savoir celui de «considérer la fidélité aux idées plus importante que l’attention à la réalité».

«Cependant, la réalité est toujours plus grande que l’idée, et lorsque notre théologie tombe dans le piège des idées claires et distinctes, elle se transforme inévitablement en un lit de Procruste, qui sacrifie la réalité, ou une partie de celle-ci, sur l’autel de l’idée», a reconnu le Saint-Père. Le mérite du volume «Femmes et ministères dans l’Église synodale» est donc de «ne pas partir de l’idée, mais de l’écoute de la réalité, de l’interprétation sapientielle de l’expérience des femmes dans l’Église».

Les femmes dans l’Instrumentum laboris

La question du rôle des femmes dans l’Église a refait surface ces derniers jours avec la publication de l’Instrumentum laboris de la deuxième session de la XVIe Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques en octobre prochain. En effet, le texte de base pour le travail des pères et mères synodaux souligne «la nécessité de mieux reconnaître» leurs charismes et leurs vocations. Les femmes, souligne le texte, «en vertu du baptême, sont dans une condition de pleine égalité, reçoivent la même effusion de dons de l’Esprit et sont appelées au service de la mission du Christ».

Ainsi poursuit l’Instrumentum laboris, le premier changement à opérer est donc «celui de la mentalité», avec «une conversion à une vision de relation, d’interdépendance et de réciprocité entre les femmes et les hommes, qui sont sœurs et frères dans le Christ, en vue de la mission commune».

Quant à la question du diaconat féminin, le cardinal Mario Grech, secrétaire général du Synode, a rappelé, lors de la conférence de presse de présentation de l’Instrumentum laboris, qu’elle ne sera pas abordée lors de la prochaine assemblée car elle fait l’objet d’un des groupes d’étude mis en place par le Pape pour approfondir la réflexion théologique et pastorale sur des questions spécifiques. Cette question a donc été confiée par François au dicastère pour la Doctrine de la foi, dans le contexte plus large des formes ministérielles, en collaboration avec le Secrétariat général du synode. Le travail, annonce le document sur les groupes d’étude publié en mars, visera à répondre au désir de l’assemblée synodale d’une «plus grande reconnaissance et appréciation de la contribution des femmes et d’un accroissement des responsabilités pastorales qui leurs sont confiées dans tous les domaines de la vie et de la mission de l’Église».

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